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                                                                                                                                                             Congo belge 1914-1918 Andre-Bernard Ergo(II)

 

Il fut décidé que l’entrée de toute notre armée se ferait le lendemain matin, sous la conduite du général Tombeur lui- même, avec défilé devant la citadelle.

Cette entrée fut ce qu’elle devait être, sobre et solennelle, aussi solennelle que le permettaient les circonstances, l’absence de chevaux (ceux-ci ainsi que les mules étant presque tous morts en route) et le manque de musique. Mais en l’occurrence, la grandeur même du spectacle venait de sa simplicité. Ce n’étaient pas des troupes de parade, ce n’étaient pas des régiments en grande tenue qui passaient, c’était une armée victorieuse après une dure campagne, au lendemain de sanglants combats dont elle frissonnait encore, qui défilait à travers la ville soumise, c’étaient d’héroïques soldats, noirs et blancs, au bout d’une longue épreuve, qui atteignaient le but.

Clairons sonnants, drapeaux déployés et claquant, au pas, les quatre régiments, l’un après l’autre, sont entrés dans Tabora. Une foule énorme faisait la haie tout au long des avenues où ils passèrent. Il y avait là toute la population indigène, des milliers d’Arabes et d’Hindous, tous les Italiens, les Anglais, les Français, les Grecs et les Belges qui avaient été retenus en captivité si longtemps et qui manifestaient l’intensité de leur joie sans cesse répétée par des acclamations dans toutes les langues aux troupes de la délivrance, ce qui faisait murmurer par nos soldats qui les prenaient pour la population allemande de la ville : « ces Ndaki sont vraiment des gens sans dignité; voilà maintenant que vaincus, ils acclament le Bula Matari ».

En fait, les Ndaki, civils allemands mêlés à la foule, regardaient froidement défiler les soldats, sans avoir l’air le moins du monde émus par ce spectacle.

Le soir de cette journée mémorable, la ville de Tabora fut éclairée par les incendies allumés par ces Ndakis. La revue des troupes terminée, celles-ci allèrent cantonner dans des positions formant une ceinture de défense autour de la ville.

Le lendemain, une grosse voiture grise entra dans la ville de Tabora ; c’était le général anglais sir Charles Crewe qui venait saluer le général Tombeur lequel avait établi les bureaux de son quartier général à la mission des Pères Blancs.

 

Ce sera le début de laborieuses négociations avec les Britanniques jusqu’à la déclaration faite par ceux-ci le 19 janvier 1917, que l’assistance des troupes coloniales belges n’était plus nécessaire à la poursuite des opérations en Afrique Orientale Allemande. En fait, le général anglais digérait très mal le fait que Tabora était tombée devant les troupes congolaises et pas devant ses propres troupes.

Le 25 février 1917, le gouvernement belge fut amené à remettre l’administration du district de Tabora aux Anglais. C’est le colonel Bataille, la mort dans l’âme et des larmes dans les yeux qui fut chargé de cette pénible mission. Une semaine auparavant, le général Tombeur avait remis son commandement au colonel Huyghé et avait rejoint le front de l’Yser avec son état-major et avec un grand nombre d’officiers et de sous-officiers belges, ainsi qu’avec une grande partie de l’artillerie. L’évacuation des troupes coloniales congolaises vers le Congo débuta en janvier 1917, à l’exception d’un corps de 2 000 hommes chargé d’occuper les territoires conquis, à la demande expresse et à l’initiative personnelle du général Smuts qui n’avait pas les états d’âme du général Crewe et qui savait pertinemment que les troupes anglaises étaient insuffisantes, en nombre, pour assurer ce service.

Le 18 avril 1918, un Ordre du Jour de l’Armée rendait hommage à l’héroïsme des troupes coloniales pendant la campagne d’Afrique en autorisant les 1er, 2ème, 3ème et 4ème régiments à broder sur leurs drapeaux le nom de « Tabora » et en autorisant le 1er régiment à y broder en outre le nom de « Lulanguru ». Il autorisait également la seconde batterie d’ar- tillerie St. Chamond à inscrire « Lulanguru » sur les boucliers de ses canons et une section de la première batterie St. Cha- mond à inscrire « Itaga » sur les boucliers des siens.

Le 13 mars 1917, le rapatriement des troupes est brusquement interrompu car la situation dans le sud-est de l’Afrique Orientale Allemande requiert à nouveau la participation des troupes congolaises pour contrer les troupes coloniales allemandes réorganisées à l’est sous le commandement de von Lettow et autour de Mahenge sous les commandements de Wintgens et de von Langen.

 

La campagne de Mahenge

Cette campagne conduite par le colonel Huyghé présente deux missions très différentes attribuées à chacune des brigades, la première sous le commandement du lieutenant-colonel Thomas aidée de deux bataillons anglais est chargée de poursuivre le détachement Wintgens-Naumann (4 compagnies, 600 soldats, 40 Européens, 16 mitrailleuses et deux canons) qui faisait une diversion vers le nord-est. Wintgens est fait prisonnier le 23 mai par le bataillon congolais qui couvrait le sud de Tabora et Naumann qui prit le commandement du détachement ne put éviter deux fois le combat à Mkalama le 7 juin et à Ikoma le 29 juin. Sa colonne rejetée vers l’est et scindée en plusieurs détachements tomba facilement, plus tard, aux mains des troupes coloniales anglaises qui occupaient cette région.

 

 

Le colonel Huyghé au cours d’une réunion à Dar es- Salam a marqué sa volonté de maintenir les forces congolaises groupées en une unité distincte sous son commandement. Les deux brigades (13 bataillons) sont donc rassemblées sur le chemin de fer à Dodoma et à Kilosa, bases de départ de leurs actions vers les zones au sud du rail. Le major Bataille commande la brigade sud. À la mi-août, deux colonnes entament une marche concentrique vers Ifakara au nord de la rivière Kilombero couvrant Mahenge, à 23 étapes de marche. L’ennemi a fait le vide des vivres et des populations et à partir du 15 novembre et de la saison des pluies, les rivières grossissent et le Kilombero fera 3 kilomètres de large.

Il est clair que les Allemands comptent utiliser la météorologie et la disette comme facteurs stratégiques pour isoler et mettre en difficulté les troupes congolaises. Celles-ci devront donc agir vite. Du premier au dix septembre, les deux colonnes réunies forcent le passage de la Kilombero, foncent vers Mahenge forçant les troupes coloniales allemandes de Tafel au repli par la manœuvre et par les combats (Kalimoto du 12 au 15 septembre et Kinkengena le 22 septembre). Le 8 octobre les troupes congolaises entrent dans Mahenge abandonnée par les troupes allemandes craignant un encerclement, mais dont le repli se fait en ordre au moyen de combats retardateurs (Katula, 13 octobre ; Lohombelo 24 octobre ; Dongawalla, 25 octobre et Chongawale, 29 octobre). Pendant ce temps, un groupement belge confié au major Hérion (deux bataillons d’infanterie le 6ème et le 4ème et une compagnie cycliste) débarque à Kilwa sur les côtes de l’Océan indien pour prendre l’ennemi à revers en s’emparant et en occupant un important nœud routier dans les environs de Liwale, localité par où pouvait passer Tafel et dont les accès étaient sous le contrôle d’un petit bataillon britannique des King’s African Rifles commandé par le major Hawkins. Le capitaine Berns du détachement congolais fut envoyé avec une compagnie vers le bataillon anglais pour lui porter assistance. À cette petite colonne était joint un peloton cycliste, car on était en saison sèche, une mitrailleuse escortée de 15 soldats, un infirmier européen assisté d’une dizaine de brancardiers et 150 porteurs sous les ordres d’un officier anglais. À peine la colonne fut-elle en marche que le sergent-major Kodja, un Azande remarquable, entendit de nombreux coups de feu dans le lointain. Le commandant Berns marcha rapidement, à la boussole dans leur direction et vers 11 heures du matin, la fusillade devenant plus distincte, les soldats de la Force publique marchèrent en éventail après avoir chargé leurs armes et mis la baïonnette au canon. Vers 11 heures et demie, une avant-garde tomba sur un sous-officier noir des troupes coloniales allemandes blessé et accompagné de trois brancardiers. Celui-ci fut immédiatement interrogé et appris à Berns que les Anglais étaient complètement encerclés par huit compagnies allemandes commandées par le major Tafel et qu’ils étaient sur le point de se rendre. Le détachement de la Force publique se déploie immédiatement. Les 38 cyclistes du lieutenant Delmotte et du sous-officier Thibaut attaquent de front. Le lieutenant Versluys et son peloton forment l’aile gauche avec le sous-officier Roberti et ses hommes à l’extrême gauche. Le commandant Berns occupe l’aile droite avec la mitrailleuse du sous-officier Manisse. Les 186 hommes de la Force publique ont l’avantage de la surprise et engagent un combat qui va durer 2 heures avant que les Allemands ne battent en retraite vers le sud et rompent l’encerclement du bataillon britannique.

Le major Hawkins enverra un mot de remerciement au commandant Berns dans lequel il s’exprimait comme suit : « Je tiens à vous remercier, ainsi que vos troupes, pour l’aide que vous nous avez prêtée. Nous étions engagés dans un combat depuis 5 h. 30 et nous avions grand besoin de renforts. J’ai commencé la retraite à 14 h. 30. Je suis très content que vous ayez trouvé le capitaine Hunt. J’ai aussi dû abandonner une mitrailleuse Maxim, un trépied pour Maxim, la crosse d’une mitrailleuse Lewis et plusieurs barils de munitions et d’outils. Je serais très heureux si vous aviez réussi à reprendre quelques-unes des pièces mentionnées ci-dessus ». (signé) E.B.Hawkins. Major 1/4 KAR.

Un officier allemand blessé (l’hauptmann Bauer) est fait prisonnier et un officier anglais (le capitaine Hunt) est libéré. L’ennemi a laissé aux mains du commandant Berns, 6 Européens et 24 Askaris, du matériel pris aux Anglais, des armes et des munitions et une caisse de médicaments. Mais la prise la plus importante est un volumineux document saisi dans les papiers du hauptmann Bauer concernant les plans de retraite de la plupart des colonnes de Tafel, avec toutes les précisions concernant les chemins à suivre et les haltes à observer pour rejoindre le gros des troupes de von Lettow. Le commandant Berns fit parvenir ce document au colonel Huyghé. Les Anglais n’eurent aucune difficulté à barrer la ligne de retraite allemande et Tafel dut se rendre, sans combattre, avec la totalité de ses troupes (1 500 hommes). Seules les forces du talentueux officier qu’était von Lettow purent pénétrer dans le Mozambique portugais. Les quelque 1 200 fusils, les 125 hommes de troupe blancs et la trentaine d’officiers et de fonctionnaires militarisés qu’elles comptaient encore, combattront jusqu’à l’armistice et menaceront même la province du Katanga. Il aurait pu en être autrement, car dès juin 1917, le colonel Huyghé avait demandé à l’État Major anglais, sans succès, l’autorisation de débarquer quelques bataillons belges au Mozambique.

Dans son livre « Heia Safari », von Lettow écrira plus tard : la colonne Tafel a dû mettre bas les armes fin novembre 1917 au nord de la Ruwama. Ceci fut pour moi un coup dur et imprévu. Von Lettow se réfugia alors au Mozambique d’où il menaça encore la Rhodésie. Il ne se rendit que 8 jours après l’armistice sur les fronts européens.

Cette seconde campagne offensive en Afrique allemande n’a pu être pleinement réussie que grâce aux tours de force réalisés par les troupes congolaises du génie, qui construisirent des routes carrossables en terrain accidenté, avec une vitesse étonnante, ce qui permit le ravitaillement permanent des troupes.

Fin 1917, la décision fut prise de renvoyer en arrière, vers Lindi, les troupes congolaises pour qu’elles puissent retourner au Congo par chemin de fer au départ de Dar es-Salam. L’année 1918 sera consacrée à ce repli sauf pour les trois bataillons désignés pour occuper les territoires de la zone belge d’occupation.

Cette seconde campagne, n’eut pas le retentissement de la campagne de Tabora et les vainqueurs de Mahenge furent longtemps oubliés et ignorés de manière injuste et impardonnable par le pouvoir. Mais les Allemands s’en souvinrent durant la seconde guerre lorsqu’ils arrêtèrent en France, le général en retraite Huyghé, qui fut transféré, au départ de la prison de Fresnes, dans un camp d econcentration en Allemagne où il mourut d’une pneumonie.

Ce n’est pas trop de quelques lignes pour parler de l’admirable travail du groupement médical sous la direction du docteur en chef Rodhain et des immenses services qu’il a rendus pendant les deux campagnes.

Dans un extrait des Ordres du Jour de l’Armée du 30 septembre 1919, c’est le colonel Huyghé lui-même qui signera l’extrait suivant : « Je cite à l’ordre du jour des troupes coloniales dans le German Est Africain les 1er, 2ème, 3ème et 4ème régiments mixtes ainsi que les services divers pour la vaillance, l’endurance et le bel esprit d’abnégation dont ces unités ont fait preuve au cours des opérations qui ont entraîné la chute des derniers réduits défensifs ennemis de Mahenge et de Luvale en Afrique Occidentale Allemande ». Ce n’est qu’en 1931, dans l’Ordre du Jour de l’Armée n° 68 du 27 novembre, que par décision du roi Albert, le nom de Mahenge sera inscrit sur les drapeaux du régiment des troupes coloniales et sur les boucliers des pièces d’artillerie, en témoignage de reconnaissance pour les faits d’armes accomplis par les troupes coloniales durant la campagne de 1917.
La Force publique ne s’est jamais battue contre les troupes du brillant officier qu’était le chef des forces coloniales allemandes von Lettow-Vorbeck engagées surtout contre les Britanniques ; voilà pourquoi il les cite à peine dans ses mémoires dans lesquelles il se concentre davantage sur les combats menés contre le général Smuts. Certains jeunes historiens comme Georges Delpierre trouvent, dans ces mémoires, prétexte à minimiser l’importance des combats menés victorieusement par les forces coloniales congolaises.

La guerre terminée, les troupes de l’Est passent alors sous le commandement du colonel Olsen et prennent cantonnement le long du Lualaba et du Tanganyika en attendant un plan de réorganisation qui fixera les garnisons définitives. Les états- majors des armées alliées rendirent hommage à la discipline et à la ténacité de la Force publique et leurs gouvernements n’eurent que des éloges pour les services rendus à la cause alliée.
Après la guerre 1914-1918, le président des États-Unis Wilson guidé par son esprit à l’idéologie simpliste, voulant supprimer ce qu’il appelait « l’impérialisme », écrivit en 14 points une règle précisant que les alliés ne retiendraient aucun des territoires qu’ils avaient conquis par les armes sur les Allemands, aussi bien en Europe qu’en Afrique. Rendre aux ennemis ces territoires conquis au prix d’énormes efforts militaires et qui garantissaient l’avenir contre des retours de flamme de l’impérialisme allemand, eût été faire un jeu de dupes. Pour concilier la morale de garantir l’avenir, on  imagina de laisser les anciennes colonies allemandes aux puissances qui les avaient vaincues et conquises; mais de les leur laisser sous un régime spécial, celui des « mandats », qui avait à sa base l’accréditation d’une certaine communauté internationale. C’était en fait un compromis comme il peut en surgir à la sortie des guerres. Dans les coulisses de Versailles, le Belge Pierre Orts mena avec tact mais fermeté de délicates négociations avec la Grande Bretagne qui s’achevèrent par la signature du traité Orts-Milner lequel donna à la Belgique un mandat sur le Ruanda-Urundi et des bases économiques dans le Tanganyika Territory. La Société des Nations confirma ce mandat après qu’un référendum auprès des populations locales exprima une préférence de celles-ci pour une tutelle belge plutôt qu’anglaise. Le général Smuts était partisan de donner aux Belges la tutelle de tous les territoires qu’ils avaient délivrés jusqu’à et y compris Tabora. Mais la politique des Alliés ne fut pas toujours, loin de là, favorable à la Belgique, comme l’a précisé et révélé le général R. Van Overstraeten attaché toute une année au Q.G. britannique.
Il était très important de préciser la véritable nature et l’origine de ces mandats car on verra, plus tard, l’interprétation qui en fut faite par les pays assemblés dans l’ONU.
Le décret du 19 mai 1919 précise les quatre missions de la Force publique :
-assurer l’occupation et la défense du territoire de la colonie ; y maintenir la tranquillité et l’ordre public ;
-y prévenir les infractions ;
-surveiller et assurer l’exécution des lois. Le décret stipule en outre :
que la Force publique est placée sous l’autorité du Gouverneur général qui en fixe l’organisation interne ; que le recrutement aura lieu par engagements volontaires et par levées de miliciens ;
que la durée du service actif ne dépassera pas 7 ans et que les réengagements seront de 3 ans au minimum.

 

1 Les « Schutztruppen », troupes coloniales allemandes du Cameroun sont composées de 12 compagnies (Feldcompagnien) affectées dans 49 garnisons. Elles sont constituées de 61 officiers, 23 médecins, 23 administrateurs civils et des techniciens en ravitaillement de munitions, de 98 sous-officiers allemands et de 1650 gradés africains. La marine anglaise bloquera les ports de Douala et de Victoria sur les côtes, tandis que les troupes coloniales françaises et belges entreront dans le pays par voie de terre. D’un point de vue organisationnel, les troupes coloniales allemandes n’ont jamais fait partie de l’armée ou de la marine impériale et ne furent jamais utilisées sur les champs de bataille européens.
2 Les troupes coloniales allemandes (les Askaris) étaient très bien équipées, entraînées et disciplinées.

 

 

 

De retour en Allemagne, le général von Lettow-Vorbeck fut reçu comme un héros national. Le régime nazi essaya en vain de le récupérer et, finalement, il fut mis à la retraite avec des moyens tellement ridicules qu’il dût travailler comme jardinier. Le général Smuts avec qui il s’était lié d’amitié durant la guerre des Boers mais qu’il avait dû combattre en 14-18, fit même une collecte en Afrique du Sud pour subvenir à ses moyens. Il est décédé à Hambourg à l’âge de 94 ans en 1964.

 

                      

On a peu parlé, dans les textes déjà publiés, des services médicaux et de leur efficacité. En fait, il y avait dans chaque régiment deux hôpitaux volants desservis par un médecin, un sous-officier infirmier, deux infirmiers congolais et 12 brancardiers qui assuraient les premiers soins aux blessés et traitaient les cas les plus urgents, avant de renvoyer ces combattants vers l’arrière. La photo suivante montre un de ces hôpitaux.

 

             

 

        

 

Le bateau allemand du lac Tanganyika, le Graf von Goetzen (1200 tonnes) a été construit par la firme MEYER en pièces détachées, de telle sorte que celles-ci puissent être assemblées en Afrique.

Les pièces, notamment 1.200.000 rivets, ont été réparties dans 5.000 caisses. Ces caisses sont parties en train jusqu’à Hambourg, puis par cargo jusqu’à Dar es Salam et de là, par train jusqu’à Kigoma, dernière station de chemin de fer. De Kigoma, elles seront transportées jusqu’au lac Tanganyika par des porteurs autochtones.

250 Africains, 20 Hindous et 3 techniciens allemands assembleront le bateau sur place et celui-ci sera mis à l’eau le 15 février 1915. Il sera armé d’un canon de 105mm à l’avant et de deux canons de 37mm à l’arrière.

Après son immobilisation par les hydravions belges, le Graf von Goetzen sera sabordé après avoir été entièrement recouvert de graisse. Quelques années après la guerre, les Belges le renfloueront puis il sera utilisé par les Anglais.

Toujours en activité aujourd’hui, la firme MEYER a proposé d’en faire la réfection complète au frais de l’Allemagne.

On sait peu de choses finalement sur cette guerre 14-18 qui s’est déroulée dans la jeune colonie du Congo belge et à laquelle a participé activement la Force publique remaniée en régiments et en bataillons. C’est peut-être l’occasion, un siècle après cette histoire de rappeler que des Congolais, aidés de Belges, ont défendu avec efficacité leur pays qui était attaqué par des troupes étrangères. Une carte de la région des hostilités peut mieux qu’un long texte faire comprendre l’importance de cette épopée.

 

On voit sur la carte ci-dessous que la Force publique a conquis une grande partie de l’Est africain allemand aussi bien à l’Ouest qu’au Sud des territoires, pour le grand bénéfice des Anglais qui ont annexé la totalité du pays sauf les petits territoires du Ruanda et de l’Urundi dont la tutelle a été donnée à la Belgique par la Société des Nations. N’apparaît pas sur cette carte l’aide apportée par deux fois par le Congo belge à la Rhodésie, notamment à Abercorn, ni celle que la Force publique a apportée à la France pour la conquête du Cameroun

 

    

 

 

On a vu dans les textes précédents que la position d’Albertville sur le lac Tanganyika avait été protégée par un canon de 160 mm amené du fort de Shinkasasa au Bas Congo. En fait il y eut deux canons de ce type pour défendre le poste comme le montre la photo ci-dessous, le second ayant été amené quatre mois après le premier. Une autre photo montre le système de rotation des canons utilisé lors de leur mise en batterie.

On a expliqué également que la maîtrise du Lac Tanganyika avait été acquise grâce à 4 hydravions et à leurs équipages belges. Ces équipages arrivèrent au lac Tanganyika au début d’avril 1916 et s’établirent leur campement à l’intérieur des terres à proximité d’un petit lac, à l’eau plus calme, de la région de N’Toa (voir photo ci-dessous). Le premier hydravion fut mis à l’eau le 16 mai 1916 comme le montre l’autre photo.

 

  

 

La construction du navire Baron Dhanis à Albertville et sa mise en circulation sur le lac Tanganyika entre Albertville et Kigoma, le terminal du chemin de fer (Dar es Salam, Dodoma, Tabora, Kigoma), a facilité l’évacuation des blessés, le transport de troupe, mais aussi l’approvisionnement en vivres, déchargeant le portage manuel d’une charge routinière éprouvante. Il facilita également les opérations de démobilisation puis celles de remobilisation des troupes en 1917.

 

        

On a signalé également les prouesses des troupes du génie de la Force publique, notamment dans la construction de routes carrossables et de ponts provisoires. Les Allemands en retraite avaient détruit le pont de 186 mètres de portée, sur la Malagarassi, coupant de la sorte la ligne de chemin de fer entre Kigoma et Tabora. Ce pont fut reconstruit en cinq semaines par les troupes du génie sous les ordres du commandant O. Jadot et du capitaine De Roover.

Des soldats furent envoyés du front belge pour remplir en Afrique des tâches particulières, notamment pour la conduite des locomotives sur la ligne Dar es Salam-Kigoma, comme le Tirlemontois Charles Rens.

 

 

 

 

 

 

 

Plus elle s’éloigne de ses bases, une armée en mouvement, sans intendance ni services, ni animaux de bât, doit avoir recours à de très nombreux porteurs. Les déplacements sur des terrains difficiles (marécages, coulées de laves, collines, rivières) sans routes tracées, pour le transport des vivres et des munitions ont été fatals pour un grand nombre de porteurs. Ceux-ci, provenant des populations congolaises, au départ, ont été ensuite prélevés dans les populations locales.

La Compagnie cycliste fait partie du détachement du Katanga. Dans la campagne de Mahenge, 38 cyclistes du lieutenant Delmotte ont participé au dégagement des Riffles anglais du major Hawkins encerclés par 8 compagnies allemandes.

 

 

 

 

 

 

 

 

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